A quelques semaines des législatives alors annoncées
pour octobre 2001 une idée fort séduisante à
première vue commenca à faire son chemin sur la place
publique: la constitution dune liste unique de lopposition
togolaise, qui devrait dans chaque circonscription électorale
soutenir un candidat unique face au RPT (parti au pouvoir). Quand
on sait que le parti du Général Eyadema qui,
rappelons-le, exerce lui-même un mandat présidentiel
frauduleusement acquis, est des plus impopulaire chez lélecteur,
est permis den tirer la conclusion que, sauf fraudes massives,
le RPT se trouve assurément sur le chemin du purgatoire politique.
Dans une démocratie ou un Etat qui aspire sincèrement
à en devenir une, une telle descente aux enfers pour douloureuse
quelle soit, est un passage obligé après tant
de décennies dexercice brutal du pouvoir, dopacité
dans la gestion de léconomie et de violations systématiques
de droits de lhomme. Malgré les avantages immédiats
dune telle stratégie de liste unique pour l'opposition,
quand on sait jusquà quel point lopposition togolaise
de son coté avait brillé et continue de briller par
ses divisions, il est tout aussi permis de se demander si lillusion
dunité daction ne sarrêtera pas au
jour de la proclamation des résultats. En dautres termes,
une victoire une telle victoire sera-t-elle gérable?
Une option au demeurant démocratique
...
La constitution dune liste unique collective est, par essence
une stratégie électorale courante dans dautres
démocraties, dès linstant où un risque
de morcellement existe ou un danger majeur devra être écarté.
Cette démarche suppose cependant un consensus minimal entre
les partis en lice sur la gestion de la période post-électorale.
Dans le cas despèce au Togo, les différents
croc-en-jambes auxquels se sont livrés les partis dopposition
les uns contre les autres, certains allant même jusquà
passer par moments des alliances stratégiques avec la dictature
communément décriée, sont autant déléments
qui laissent plus dun sceptiques quand la survie politique
dune telle alliance électorale et sur la possibilité
dune gestion collégiale et consensuelle de la période
post-électorale.
L'évaluation
des différentes formations politiques par les électeurs
est une nécessité
Cest le lieu de remarquer que les formations politiques togolaises,
qui sont tout au plus connues sur la place publique à travers
leurs sigles et la personne de leurs leaders que par leurs programmes
politiques, encore moins leurs programmes de gouvernement, nont
jusquà jour daujourdhui jamais eu à
mesurer leur degré de représentativité réelle
sur léchiquier politique national. Si labsence
dune telle évaluation nécessaire est beaucoup
moins imputables aux partis dopposition quà la
stratégie de la terreur qui règne au Togo depuis plus
dune décennie et a obligé la population à
développer des stratégies de survie, les élections
et non les querelles de personnes devraient permettre au Peuple
souverain dévaluer les formations politiques sur la
bases de leurs positions respectives sur les granges questions à
savoir sécurité interne, respect des droits de lhomme,
indépendance de la justice, sécurité sociale,
redressement économique, etc.
Cette approche aura le
mérite d'indiquer la représentativité réelle
de chaque formation. En Afrique du Sud avant les élections
générales de 1994, une armada de propagande avait
été déployé aussi bien dans le pays
qu'à l'Etranger pour laisser croire qu'un parti comme l'Inkhatha
Freedom Party de Buthelezi serait "incontournable" dans
la solution du problème de l'apartheid. Qu'à cela
ne tienne! L'électeur, dans sa sagesse, a vite fait de trancher
et de prononcer un verdict beaucoup moins contestable que si jamais
une note collective avait été attribué à
tout ceux qui se réclamaient de la lutte contre l'apartheid
... La suite, nous la connaissons.
Un piège sans fin
Le choix de candidats uniques par circonscriptions électorales
sans dire sur la bases de quels critères objectif, évoluera
très probablement vers des choix ethniques. Il en résultera
que le candidat élu se retrouvera nécessairement dans
un conflit de loyautés entre les demandes de populations
locales, les orientations de son propre parti et les orientations
dun parlement à qui il devra «quelque chose»
de très flou. Selon quels critères seront identifiées
les formations de l'opposition, dont les postulants participeront
à cette liste? Cet aspect n'est pas à sous-estimer,
quand on sait la véhémence avec laquelle certains
leaders avaient dans un passé proche tenu à marteler
qu'il n'existerait pas d'opposition au Togo mais des oppositions
au pluriel. Selon quels dosages politiques ces postulants seront-ils
choisis? Le partage et la gestion des portefeuilles gouvernementaux
représenteront le prochain obstacle à franchir. La
cacophonie qui en résultera entre les partis d'opposition
d'aujourd'hui ne fera que le jeu du RPT, car ces conflits d'orientations
au Parlement se répercuteront au niveau dun gouvernement
de coalition dont le Premier Ministre ne sera pas à envier,
tant il devra faire les grands écarts entre deux eaux. Les
revirement d'alliances en seront d'autant facilités pour
ceux qui d'une façon ou d'une autre ne se retrouveront pas
ou plus dans une telle "coalition artificielle"
sans base politique commune.
Dans ce contexte et compte tenu de ce qui précède
la formation d'une liste commune de l'opposition est aussi dangereuse
qu'une bataille de l'opposition en rangs dispersés. C'est
pourquoi il apparaît judicieux d'avoir le courage politique
de se soumettre au verdict des urnes après avoir communément
assurer le maximum d'équité et de transparence possible.
A la limite, des alliances pourront permettre aux leaders de partis
de s'assurer leurs mandats respectifs, afin de rester dans le jeu
politique, car après tout on ne gouverne pas en restant sur
le balcon du Parlement, mais de l'intérieur de l'Assemblée.
C'est alors seulement que des alliances et reports de voix systématiques
pourraient être passés pour le second tour en cas de
ballottages. Tout autre chose serait une tentative de substituer
des choix dangereux au choix, au verdict du Peuple togolais souverain.
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