Lomé,
26 avril 2003: Plus de 20.000 personnes ont fêté
samedi, dans la joie et le calme, le retour à Lomé,
après quatre ans d'exil, de Gilchrist Olympio, principal
opposant togolais au président Gnassingbé Eyadéma.
L'opposant, candidat déclaré à la présidentielle
du 1er juin prochain, n'a pu franchir la frontière du Ghana
voisin, d'où il est arrivé dans la matinée,
qu'après trois heures de formalités policières
au poste togolais de Kodjo-Viakopé.
"Mon passeport togolais ayant expiré, j'ai dû
utiliser mon passeport ghanéen, ce qui n'a pas été
facile", a expliqué à la presse M. Gilchrist.
Après les formalités de douane et de police, le cortège
composé de quatre voitures s'ébranle vers la ville
de Lomé, distante de seulement quelques kilomètres.
A un carrefour, M. Olympio fait le V de victoire. Il est aussitôt
reconnu par le public qui lui répond par des cris et des
acclamations.
Aux cris de "Gilchrist Président" ou "Eyadéma
signe ta démission", la foule brise le cordon de sécurité,
assuré par plus de 50 gendarmes et policiers, pour accompagner
la suite de l'opposant historique.
Les Zémidjans, les taxi-motos qui sillonnent la capitale,
se sont eux aussi joints au cortège, se mêlant à
la foule dans un vacarme mécanique assourdissant pour soutenir
leur "candidat".
Sur près de 10 km, femmes, jeunes, adultes, arborant tee-shirts
et casquettes aux couleurs jaunes de l'Union des forces du changement
(formation de M. Olympio et principal parti de l'opposition) ont
accompagné "leur président" jusqu'au stade
du quartier populaire d'Ablogamé, où il a tenu un
meeting en langue Ewé, une des ethnies du sud du Togo.
"Il a confirmé sa décision d'être candidat
à l'élection présidentielle pour améliorer
les conditions de vie déplorables des Togolais", traduit
Vigno Hounkanly, instituteur, ravi du retour de M. Olympio "au
pays" et venu prendre part au meeting avec toute sa famille.
"Gilchrist est notre candidat, si jamais on nous le retire,
nous ne serons pas responsables de la suite", menace un militant,
la tête entouré d'un foulard jaune à l'effigie
de l'opposant.
Le général Eyadéma, au pouvoir depuis 36 ans,
avait annoncé son intention de se retirer de la course à
la présidentielle de 2003, conformément à la
constitution. Mais le 30 décembre 2002, l'Assemblée
nationale, dans laquelle il dispose d'une majorité écrasante,
a modifié la constitution afin de lui permettre éventuellement
de briguer un nouveau mandat. Il a été désigné
samedi candidat par son parti, le Rassemblement du peuple togolais
(RPT) mais ne s'est toujours pas officiellement prononcé
sur son éventuelle candidature.
Les députés ont aussi modifié la constitution
en y intégrant une disposition du code électoral qui
prévoit que tout candidat à l'élection présidentielle
doit avoir résidé au Togo pendant au moins douze mois
avant le scrutin, ce qui exclut théoriquement Gilchrist Olympio
de la course.
"Les dispositions dans la constitution ont été
amendées par le parlement monocolore de M. Eyadéma",
a estimé M. Olympio, à l'issue du meeting, avant de
réaffirmer son intention d'être candidat.
"Si M. Eyadéma, de façon injuste, invoque des
lois scélérates pour m'écarter ou me battre
(...), nous prendrons les dispositions qui s'imposent", a-t-il
ajouté.
M. Olympio, fils de l'ancien président président
Sylvanus Olympio, assassiné en 1963, n'est pas retourné
au Togo "depuis 1999 pour des raisons sécuritaires.
Plusieurs fois condamné à mort par contumace, Gilchrist
Olympio, a été blessé en 1992 dans un attentat
au Togo.
L'opposant doit rentrer samedi soir au Ghana après avoir
"pris contact avec la base et lui expliquer la situation",
a-t-il indiqué.
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